Les gentils gagnent 20% de moins.

Les gentils gagnent 20% de moins

Les professionnels gentils – c’est à dire « agréables » – gagneraient 20% de moins que leurs homologues désagréables.

Analysons ce mythe sur les gentils avec de vraies données scientifiques.

Les gentils finissent derniers.

Cette croyance traverse les open spaces depuis des décennies, alimentée par une étude de 2012 qui a marqué les esprits : les hommes agréables gagneraient 18% de moins que leurs collègues moins bienveillants.

Cette statistique, rapidement transformée en « les gentils gagnent 20% de moins », est devenue l’argument massue pour justifier tous les comportements carriéristes. Elle a nourri une génération de professionnels convaincus qu’être gentil au travail était incompatible avec la réussite financière.

Pourtant, cette interprétation repose sur une lecture partielle des données. Des recherches plus récentes et approfondies révèlent une réalité bien plus nuancée, où le niveau de revenus, le secteur d’activité et la hiérarchie des valeurs personnelles redéfinissent complètement l’équation.

Pour les cadres et dirigeants que vous êtes, cette nuance change tout. Votre bienveillance naturelle n’est plus un frein à votre évolution professionnelle – elle peut même devenir un différenciateur stratégique, à condition de la maîtriser.

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L’étude qui a tout déclenché sur la gentillesse au travail (2012)

En 2012, trois chercheurs américains publient une étude qui va marquer les esprits.

Timothy Judge, Beth Livingston et Charlice Hurst analysent les revenus de milliers de professionnels en fonction de leur niveau d’agréabilité – autrement dit, leur tendance naturelle à être coopératifs, empathiques et bienveillants.

Leur découverte choc : les hommes très agréables gagnent en moyenne 18% de moins que les hommes peu agréables. Traduit en euros, cela représentait environ 7 200€ de différence annuelle sur un salaire de 40 000€.

Cette étude a été reprise partout, des blogs aux conférences TED, souvent résumée par la formule percutante : « Les gentils gagnent 20% de moins. »

 

Source : Judge, T. A., Livingston, B. A., & Hurst, C. (2012). Do nice guys—and gals—really finish last? The joint effects of sex and agreeableness on income. Journal of Personality and Social Psychology, 102(2), 390–407. Lien vers l’étude

Ce qu’on ne vous a pas dit sur cette étude

Mais voilà ce qui était moins médiatisé dans les conclusions de 2012 :

L’effet concernait surtout les hommes
Chez les femmes, l’écart était bien moindre (environ 5%) et parfois non significatif selon les échantillons. Les chercheurs expliquaient cela par des attentes sociales différentes : on « pardonne » plus facilement à une femme d’être agréable qu’à un homme.

L’effet variait selon les secteurs
Dans certains domaines (vente, négociation pure), l’écart était plus marqué. Dans d’autres (éducation, santé, services), il était négligeable.

L’étude ne mesurait que le salaire
Elle ne prenait pas en compte d’autres formes de réussite : satisfaction au travail, qualité des relations, bien-être, ou même progression à long terme.

Les gentils gagnent moins mais font d'autres choix
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La contre-enquête de 2020 : quand les chiffres se nuancent

Huit ans plus tard, Sandra Matz (Columbia Business School) et Joe Gladstone (University College London) décident de creuser plus profondément. Ils analysent des données massives : plus de 2,4 millions de personnes sur plusieurs continents. Une étude énorme.

Leur découverte majeure :
L’effet « les gentils gagnent moins » n’est pas universel. Il dépend massivement du niveau de revenus de la personne. Autrement dit, l’agréabilité ne pénalise financièrement que certains profils, dans certaines conditions économiques. Pour d’autres – notamment les cadres et dirigeants – cet effet négatif disparaît.

Cette nuance change tout : elle signifie que des millions de professionnels bienveillants se sont auto-limités en croyant à un handicap qui ne les concernait pas.

Source : Matz, S. C., & Gladstone, J. J. (2020). Nice guys finish last: When and why agreeableness is associated with economic hardship. Journal of Personality and Social Psychology, 118(3), 545–561. Lien vers l’étude

Le facteur revenus : tout change selon votre situation

Voici ce que révèle cette nouvelle étude de 2020 :

  • Pour les personnes à faibles revenus (moins de 25 000€/an) :

L’agréabilité peut effectivement pénaliser financièrement.
Pourquoi ?
Parce que ces personnes dites agréables priorisent d’autres critères que l’argent dans leurs choix professionnels (relations, sens du travail, équilibre vie pro/perso). Quand le budget est serré, cette tendance à privilégier le bien-être relationnel plutôt que l’optimisation financière peut avoir des conséquences importantes : moins de négociations salariales, choix d’emplois moins rémunérateurs, etc.

Les personnes très agréables ont donc simplement une hiérarchie de valeurs différente. Elles sont prêtes à accepter des compromis financiers pour préserver l’harmonie, éviter les conflits, ou choisir des environnements plus bienveillants.

  • Pour les personnes à revenus moyens à élevés :

L’effet s’atténue considérablement, et peut même s’inverser dans certains contextes.
Pourquoi ?
Parce que ces professionnels qui ont des revenus plus élevés peuvent « se permettre » d’être agréables. En effet, ils ont développé d’autres compétences qui compensent. Ils évoluent dans des environnements où la collaboration est valorisée, et ils ont souvent les moyens de faire des choix de carrière alignés avec leurs valeurs.

Le mécanisme psychologique qui est à l’œuvre

Les chercheurs ont identifié le mécanisme précis qui explique ces différences :

Les personnes très agréables accordent moins d’importance à l’argent. Ce n’est pas qu’elles sont naïves ou incompétentes, c’est qu’elles priorisent d’autres éléments : l’épanouissement, les relations, le sens, l’équilibre vie pro/vie perso.

Cette différence de priorités se traduit concrètement par :

  • Moins de négociations salariales
  • Des choix de carrière privilégiant le sens sur le salaire
  • Moins de changements d’entreprise motivés uniquement par l’argent
  • Une tendance à accepter des compromis financiers pour préserver les relations

Ce que cela signifie concrètement pour vous

Si vous vous reconnaissez dans le profil « agréable », voici ce que ces recherches révèlent :

  • Votre bienveillance n’est plus un frein à votre niveau si vous êtes cadre ou dirigeant.

À votre stade de carrière et de rémunération, l’effet pénalisant de l’agréabilité devient statistiquement négligeable.

  • Vous disposez des ressources pour optimiser votre approche.

Contrairement aux profils à faibles revenus, vous avez la marge de manœuvre nécessaire pour allier vos valeurs et vos objectifs professionnels.

  • L’enjeu devient stratégique, pas financier.

Si vous êtes insatisfait de votre salaire, votre levier est stratégique. Il s’agit d’optimiser votre communication de valeur, de structurer vos demandes d’évolution, et de transformer votre bienveillance en soft power.

Découvrez comment reconnaître si votre gentillesse vous rend invisible au travail, et les premiers leviers pour reprendre votre place sans trahir vos valeurs.

 

 Vous maitrisez votre sujet, vos collègues vous apprécient, votre manager vous fait confiance. Cependant, lors des réunions importantes…

 

Lire l’article : Gentil, compétent… mais invisible

Découvrez comment reconnaître si votre gentillesse vous rend invisible au travail et les premiers leviers pour reprendre votre place sans vous trahir.
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Agréabilité ? De quoi parle-t-on ?

)L’agréabilité : entre atout relationnel et vulnérabilité professionnelle

 

L’agréabilité constitue l’une des cinq dimensions fondamentales de la personnalité selon le modèle des Big Five (description ci-dessous).

Ce trait se caractérise par des comportements perçus comme bienveillants, coopératifs et chaleureux, reflétant une tendance naturelle à privilégier l’harmonie sociale et la coopération. Les personnes à forte agréabilité font généralement confiance aux autres, qu’elles perçoivent comme honnêtes et dignes de confiance, et adoptent spontanément des comportements altruistes.

À l’inverse, un faible niveau d’agréabilité se traduit par une approche plus sceptique des relations interpersonnelles, marquée par la méfiance et une préférence pour la compétition plutôt que la collaboration.

Cette dimension englobe plusieurs sous-traits interconnectés : la confiance, la droiture, l’altruisme, le respect d’autrui, la modestie et la sensibilité.

Si l’agréabilité est généralement valorisée dans les interactions sociales, les recherches récentes révèlent un paradoxe troublant : dans certains contextes professionnels et financiers, cette qualité humaine peut devenir un facteur de vulnérabilité, particulièrement pour les profils discrets et compétents qui peinent à faire valoir leurs intérêts.

Cette dimension scientifique de l’agréabilité rejoint directement ce que nous observons chez les « gentils » dans l’environnement professionnel : des individus naturellement bienveillants et coopératifs qui, par leur propension à privilégier l’harmonie et à faire confiance, peuvent se retrouver désavantagés face à des enjeux de carrière et de reconnaissance.

 

Le modèle des Big Five (ou les 5 composantes O.C.E.A.N

 

  • (O) Ouverture : appréciation de l’art, de l’émotion, de l’aventure, des idées peu communes ou des idées nouvelles, curiosité et imagination ;
  • (C) Conscienciosité (conscience morale) : autodiscipline, respect des obligations, organisation plutôt que spontanéité ; orienté vers des buts ;
  • (E) Extraversion : énergie, émotions positives, tendance à chercher la stimulation et la compagnie des autres ;
  • (A) Agréabilité (amabilité) : une tendance à être compatissant et coopératif plutôt que soupçonneux et antagonique envers les autres ;
  • (N) Nevrotisme ou névrosisme : contraire de stabilité émotionnelle, tendance à éprouver facilement des émotions désagréables comme la colère, l’inquiétude ou la dépression, vulnérabilité.
Les gentils ne gagnent pas forcément moins
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La réalité nuancée en 2025 sur le mythe : les gentils gagnent moins

Aujourd’hui, avec le recul de ces recherches, la formule « les gentils gagnent 20% de moins » apparaît comme une simplification dangereuse.

La réalité : L’agréabilité peut pénaliser financièrement dans certains contextes (revenus faibles, secteurs très compétitifs, négociations pures), mais elle peut aussi devenir un atout dans d’autres (management, innovation, secteurs collaboratifs, leadership à long terme).

L’enjeu n’est pas de devenir moins gentil, mais de devenir plus stratégique dans votre gentillesse.

Cela signifie concrètement : garder votre bienveillance naturelle tout en développant votre assertivité financière, votre capacité à négocier, et votre conscience de votre valeur professionnelle.

Dans cette perspective, votre agréabilité devient un différenciateur positif plutôt qu’un handicap à compenser.

Une conclusion en nuances

Le mythe des « gentils qui gagnent 20% de moins » résiste mal à l’analyse des données complètes. Cette corrélation ne constitue pas une loi universelle du monde professionnel.

La véritable découverte de ces recherches : l’agréabilité pénalise financièrement quand elle s’accompagne d’une hiérarchie de valeurs qui place systématiquement l’harmonie avant la reconnaissance financière. 

À votre niveau de responsabilité et de rémunération, l’équation change. Vous disposez des ressources et de la marge de manœuvre nécessaires pour allier bienveillance et ambition financière. L’enjeu n’est plus de choisir entre gentillesse et réussite, mais de développer une gentillesse stratégique.

Cette approche vous permet de conserver votre authenticité. A condition d’optimiser votre impact professionnel. Votre bienveillance peut devenir un atout différenciant si vous apprenez à la maîtriser.

Pour aller plus loin : 3 questions de coach

Avant de replonger dans le tourbillon de votre quotidien, prenez le temps de vous poser ces questions. Elles vous aideront à identifier précisément où vous en êtes et quels leviers actionner en priorité.

    Ces questions ne cherchent pas à vous faire changer de valeurs. Elles vous invitent à développer une gentillesse stratégique pour que votre bienveillance devienne un atout professionnel plutôt qu’un frein supposé.

     

    SITUATION CONCRETE : Repensez à votre dernière négociation salariale ou demande d'évolution.

    Qu’est-ce qui vous a le plus freiné : le manque d’arguments sur votre valeur, la peur de détériorer la relation, ou la conviction que « ce n’est pas le bon moment » ?

    Cette question révèle si votre bienveillance influence réellement vos décisions financières ou si d’autres facteurs entrent en jeu.

    Si vous identifiez la peur de détériorer la relation comme frein principal, cela confirme que votre agréabilité impacte vos négociations. Dans ce cas, travaillez sur la reformulation : une demande d’augmentation peut être présentée comme bénéfique pour l’équipe (« avec cette reconnaissance, je pourrai m’investir encore davantage sur… »).

    Si c’est le manque d’arguments qui vous freine, votre enjeu est différent : documentez systématiquement vos réussites et quantifiez votre impact.

    Si c’est le timing qui vous préoccupe, questionnez-vous sur cette croyance : attendez-vous le moment parfait qui n’arrive jamais ?

     

    REGARD EXTERIEUR : Si un collègue observait votre façon de communiquer sur vos résultats et vos demandes

    Vous décrirait-il comme quelqu’un qui minimise ses réussites, qui justifie excessivement ses demandes, ou qui présente ses accomplissements avec assurance ?

    Cette perspective externe objectivise votre posture actuelle et révèle les patterns que vous ne percevez pas forcément.

    Les profils agréables ont souvent tendance à minimiser leurs réussites par modestie ou à sur-justifier leurs demandes par souci de légitimité. Observez votre vocabulaire : utilisez-vous souvent « juste », « simplement », « peut-être » ? Commencez-vous vos demandes par « je sais que ce n’est pas le bon moment, mais… » ?

    Ces marqueurs linguistiques affaiblissent votre message avant même de l’avoir énoncé. À l’inverse, noter si vous présentez vos réussites de manière factuelle et directe révèle une maîtrise de votre communication de valeur.

     

    ACTION IMMEDIATE : Identifiez une situation professionnelle récente où vous avez privilégié le statu quo au détriment de votre intérêt financier.

     Comment pourriez-vous reformuler votre approche pour allier bienveillance et assertivité ?

    Cette question ancre la réflexion dans le concret et vous invite à tester une approche différente.

    Par exemple, si vous avez accepté une mission supplémentaire sans compensation par peur de dire non, reformulez : « Je suis ravi de contribuer à ce projet. Pour l’intégrer à ma charge actuelle, nous pourrions envisager soit un réaménagement de mes autres priorités, soit une reconnaissance spécifique de cet investissement. »

    Cette approche préserve votre bienveillance (vous acceptez de contribuer) tout en posant un cadre clair (avec des conditions).

    L’objectif n’est pas de devenir transactionnel, mais de rendre visible la valeur que vous apportez, même dans votre générosité.

     

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    Ces questions vous parlent et vous aimeriez aller plus loin ? Il est temps de mesurer précisément où vous en êtes.

    Le test « Êtes-vous trop gentil pour réussir ? » vous permet d’identifier en 3 minutes vos freins professionnels spécifiques et vos leviers de progression prioritaires.

    Ce test ne se limite pas à la question financière. Il vous apporte un regard à 360.

    Trop gentil.le pour réussir ?

    Un test rapide (15 questions) pour comprendre ce qui vous freine… et comment transformer votre gentillesse en soft power stratégique.

    3 dimensions analysées :
     Comportements professionnels
     Perception de soi et croyances
     Impact sur votre trajectoire, vos relations, vos ambitions

    Découvrez votre profil, identifiez vos leviers de progression, sans renier vos valeurs.

    Etes-vous trop gentil.le pour réussir ?

    15 questions – 3 minutes – 100 % gratuit
    Résultats + conseils personnalisés

    1. Quand je sens qu’un désaccord arrive :

    2. Dans mon travail, j’ai le sentiment :

    3. Face à une personnalité dominante

    4. Quand on me demande un service de trop

    5. Quand je pense à mes ambitions

    6. Poser une limite claire

    7. Dans ma carrière

    8. Quand on parle de “se vendre”

    9. Si un collègue est promu à ma place

    10. Sur LinkedIn

    11. Je me sens souvent

    12. Quand je regarde mon parcours

    13. Quand je pense à “prendre ma place”

    14. Je me dis souvent

    15. Globalement, ce que je cache le plus, c’est

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